LA UNE DU MAT

LE JOURNAL DE CE QUI S'ÉCRIT DANS LE MONDE A LA PREMIÈRE HEURE - HEBDOMADAIRE

INDE TÉMOIGNAGE: UNE JOURNÉE D'ÉMOTIONS

Hier, des amis Indiens m’ont dit ‘demain on va nourrir des gens, tu veux venir ?’.
Nourrir des gens ? Comme au Resto du Cœur ? Ok, je viens.

Au resto du cœur, il y a une certaine organisation, des gens qui font la queue et de longues tables qui servent aussi de barrières. On s’inscrit pour participer à cette aide et on a un rôle bien défini.

Aujourd’hui, ca ne s’est pas du tout passé comme ca – pas du tout.

Je me suis retrouvée dans un endroit surpeuplé de misère, entourée de personnes à moitié nues, maigres à l’extrême, dépouillées de tout, allongées ou assises par terre, attendant que la vie passe sous une chaleur torride de plus de 45 degrés.
Mais ou suis-je ?!

Mes amis ont ouvert le coffre de leur voiture qui contenait des repas pour 500 personnes. Une portion = 2 morceaux de pain, des lentilles dans du jus style légume et une sorte de boule orange péguante (Ndlr = collante) en guise de dessert. D’un coup d’un seul, les affamés sont arrivés formant une sorte de vague humaine prête à nous engloutir. Mais qu’est ce qui se passe ? Attention ! Et ho ! Ça va, pousse pas ! 2mn, arrête ! Ça vient !
Et nous voilà en train de distribuer des repas, sous une chaleur d’enfer - confrontant des hommes, des femmes, de tous petits gamins et en ce qui me concerne, des émotions que je n’avais ressenti qu’une seule fois dans ma vie, il y a 20 ans en Roumanie.

Les gens crient, poussent, nous touchent, il fait chaud, trop chaud, les enfants se faufilent, tirent nos pantalons, un homme avec un bâton de bois arrive et se déclare partie de l’organisation, tape les enfants, je dis NON PAS LES ENFANTS, ça pousse encore et encore, il fait tellement chaud, on commence à distribuer les repas, les gens se calment, forment presque une queue, il est impossible de voir ou elle s’arrête, mais d’où sortent ils tous ces gens ? Nous sommes 6 et le rythme est plus que soutenu, il faut aller vite - ca s’impatiente derrière.
Toi ! non, tu es déjà venu. Toi ! tu fais la queue comme tout le monde. Toi !!! Ah non pas toi, t’es trop petit, je t’ai bien vu venir 3 fois mais on dit rien, je t’en donne encore. Toi ! Arrête de pousser. Toi ! fais une ligne. Mais qu’est ce qu’il fait chaud, je dégouline de chaleur, je suis épuisée.

Je sens que je vais pleurer, je n’ai jamais vu une telle misère, si proche, si dense. Je dois être bénie des Dieux ou juste méga super chanceuse d’être née sous cette étoile.
Non, tu ne peux pas pleurer, tu n’en a pas le droit, tu n’es pas celle dans la misère et là, maintenant, des gens ont besoin de toi ! Je me concentre, il fait trop chaud, personne ne parle dans l’équipe, de toute façon ça va trop vite, la queue ne diminue pas, il n’y a presque plus de repas, qu’allons nous faire ?

On ferme le coffre.
On regarde ceux qui restent.
On se promet de revenir.
On retourne à notre bonne étoile.
Que la vie est injuste parfois – quelle leçon en tirer ?
Je ne sais pas encore, je suis juste émue, fatiguée, meurtrie..

L’Inde – 200 millions de personnes qui souffrent de malnutrition.

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